Monsieur le chat
EAN13
9782909240923
ISBN
978-2-909240-92-3
Éditeur
Ecriture
Date de publication
Collection
LITTERATURE FRA
Nombre de pages
275
Dimensions
22,7 x 14,3 x 2,5 cm
Poids
380 g
Langue
français
Code dewey
636.8
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Monsieur le chat

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DU MÊME AUTEUR

Approches de l'art moderne, Bartillat, 2007.

Paris, point du jour, Bartillat, 2006.

Le Dieu du sable, Phi/ Les Écrits des Forges, 2006.

Le Silentiaire, Dumerchez, 2004.

Mémoires provisoires, entretiens avec Marie Cayol, L'Harmattan, 2002.

Le Manuscrit de Roquemaure, Le Chariot, 2002.

Le Miel de l'abîme, L'Harmattan, 2000.

L'Œil imaginaire, L'Harmattan, 1998.

Le Piéton de Venise, prix Henri de Régnier de l'Académie française, Bartillat, 2005.

Le Livre des amants, L'Harmattan, 1996.

Les Alphabets du feu (Byblos, La Parole planète, Le Scribe errant), 1991-1993, grand prix de poésie de l'Académie française et de la SGDL.

L'État naissant, L'Harmattan, 1996.

Le Diderot de Borès, Éditions du Salin, 1975.

Infini au-delà, prix Apollinaire, Flammarion, 1973.

Norge, Seghers, 1972.

Nuit majeure, Flammarion, 1968.

Le Grand Suppositoire, entretiens avec Lawrence Durrel, Pierre Belfond, 1972 ; rééd. augmentée, Gutenberg, 2007.

La Nouvelle Poésie française, Robert Morel, 1968.

Les Murs de la nuit, Robert Morel, 1967.

André de Richaud, Seghers, 1966.

Kosovel, Seghers, 1965.

Gérard de Nerval, J'ai Lu, 1965.

Le Déplacement, roman, Flammarion, 1964.

Célébrations du tabac, Robert Morel, 1962.

Délébiles, Ides et Calendes, 1962.

Les Poètes du XVIe siècle, J'ai Lu, 1962.

Dylan Thomas, Seghers, 1962.

François Mauriac, Seghers, 1960.

Brûler le feu, Seghers, 1959.

Le Temps des autres, prix Max Jacob, Seghers, 1957.

Cruels divertissements, Seghers, 1957

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eISBN 978-2-3590-5089-9

Copyright © Écriture, 2009.

ÉPIGRIFFES

La voix des chats rend amoureux le vent lui-même.

Lope de Vega

Tennessee a dormi ici pendant deux nuits avec 9 999 chats.

Tennesse Williams

Et qu'est-ce que ça peut faire, dit le chat puisqu'on est contents nous ?

Jacques Prévert

Origines

e9782359050899_i0002.jpgLe chat est un grand mystère venu à notre rencontre depuis le fond des âges, à pattes de velours. Léonard de Vinci le qualifiait de « vrai chef-d'œuvre », parole d'expert que je me plais à griffonner au seuil du présent ouvrage consacré à la mirobolante créature dont le frôlement soyeux nous accompagne comme un cadeau du ciel. Que la déesse égyptienne Bastet, incarnation de la félinitude, avec son corps de femme et sa gracieuse tête de chatte, prenne soin de ces écritures de gouttière, elle qui porte en guise de sac à main le panier d'osier des accoucheuses, l'œil Oudjat assurant la santé et ce curieux instrument de musique à percussion, le sistre, semant la panique jusque chez les démons !

Ne devons-nous pas à cette divinité de la fécondité, de la joie de vivre et de la danse la résurrection quotidienne du soleil ? Car la chatte cosmique originelle, affublée du sobriquet peu seyant d'Œil-de-Râ, affrontait chaque nuit le dragon-serpent Apopis, sale bête dissimulée dans les bas-fonds des ténèbres afin d'agresser l'astre solaire en équilibre instable sur sa barque dorée. Face à ce Léviathan boursouflé de venin, personnification des forces hostiles de la matière, seul le chat – lui-même frontalier du lumineux et de l'obscur – osait se dresser. À l'instant où Apopis pesait de tout son poids sur la proue de la barque prête à chavirer, le chat, Zorro des galaxies, bondissait, élastique, fantastique, pour saisir entre ses dents le répugnant reptile et le décapiter. Cela se déroulait à la douzième heure, ce midi de la nuit qui, sur le cadran émaillé des horloges, marque à la fois le terme et le recommencement du temps. Le soleil, dès lors, pouvait poursuivre en toute quiétude son périple invisible en attendant de reparaître, répandant ses rayons sur le peuple des vivants, indissociable de la communauté souterraine des morts. La lumière est le présent inestimable que nous offre le chat, ronronnant bienfaiteur que les Égyptiens nommaient miou ou myeou : « Qui est ce Grand Chat ? C'est le dieu Rê lui-même. Miou est son nom, car il parle en miaulant. Le nom du dieu qui veille sur toi est Chat. »

C'est en catimini que Monsieur le chat fait son entrée dans l'Histoire. On connaît ses façons d'illusionniste : il apparaît soudain, venu on ne sait d'où, jaillissant du double-fond du huit-reflets de Robert Houdin ou d'Arsène Lupin. Chapeau, l'artiste ! Voyez comme il s'infiltre, s'insinue, se faufile, habile à déceler les passages secrets, les portes dérobées que l'on actionne d'une pression sur l'oreille ou le nez d'un ange sculpté dans le bois d'un panneau – et d'un coup, d'un seul, il est là, le mystique gris, le clochard de sang bleu aux bottes de sept lieues : le chat qui ne ressemble qu'à lui-même...

L'homme d'avant l'écriture qui, le premier, eut l'audace de fixer la silhouette de cette ébouriffante créature sur quelque fresque rupestre (comme à Gabillou, en Dordogne, où certains croient la reconnaître) faisait-il référence à un animal déjà familier ou peignait-il une aspiration vague, une sorte de préchat ? On peut se demander, en effet, si le besoin du chat ne préexistait pas à l'animal lui-même, hypothèse fondée sur la découverte d'étranges figures prémonitoires, telle cette statuette du sud-est de la Floride (vers 1450) représentant un chat encore inconnu en Amérique. Les pays sans chats sont tristes, qui attendent au long des millénaires, comme l'Australie, le débarquement des matous navigateurs. Quel soulagement lorsque se profile enfin la forme inimitable : « Miaougre, me voici ! » Un bout de charbon, une pointe suffisent à l'enfant pour donner vie au chat. Les écoliers de l'Égypte pharaonique ne se différenciaient guère, sur ce point, des minots de nos banlieues: ils traçaient des dessins de chatons en posture de jeu sur des ostraca, fragments de poterie que l'on utilisait alors comme brouillons et dont on se débarrassait après usage ; c'est pourquoi, de nos jours encore, le moindre coup de pelle dans les limons du Nil permet d'en déterrer treize à la douzaine.

Où ne fourre-t-il pas son nez, ce chat à neuf vies dont on a exhumé une dent unique à Jéricho – l'une des cités mères du monde antique avec Byblos –, parmi des vestiges vieux de huit mille ans ? De la vallée de l'Indus à celle du Tigre, la bien nommée, on retrouve un peu partout le sceau en creux de sa fameuse patte, capable, selon la croyance populaire, de faire tomber la pluie d'un simple frottement par-dessus les oreilles. Faiseur de pluie, cela en jette davantage que « souricier » sur une carte de visite ! De quoi turlupiner ce pauvre Noé, en dépit de son caractère bien trempé, et assurer le triomphe de Marcel Aymé lorsqu'il compose les Contes du chat perché.

Sur les parois de tombes datées de 1600 avant notre ère sont représentés des matous occupés à s'amuser avec un brin d'herbe ou à grignoter du poisson aux pieds de leur maître, scènes si vivantes qu'on pourrait les croire en train de se dérouler sous nos yeux, hors de toute durée. Ces fresques suggèrent à la fois l'ancienneté de l'alliance entre l'homme et le chat – et son éternelle jeunesse. Devant un chaton bondissant dans un rayon de soleil, qui pourrait deviner qu'il a accompli un si long voyage avant de nous rejoindre ? D'une discrétion à toute épreuve, il a su, dans son coin, se tenir à carreau jusqu'à l'extinction des sauriens géants, ce qui prouve sa malice, et ne devenir visible qu'au commencement de l'histoire humaine. Il a misé sur l'homme, personnage remuant, cruel mais inventif, gagnant du gros lot au Loto de l'évolution et susceptible de lui rendre quelques menus services en échange de ses propres talents de société : chasse aux rats, protection contre les serpents – de la vipère au cobra –, sans parler du don de ses yeux étoilés et de sa fourrure électrique, piège à caresses.

La phosphorescence des yeux du chat, les variations de diamètre de ses pupilles, en fonction de l'intensité de la lumière, semblaient l'associer à la croissance et à la décroissance du satellite de la Terre. On croyait alors que ...
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