Aux filles du conte

Frédérique Bertrand, Thomas Scotto

Éditions du Pourquoi pas

  • 7 avril 2022

    C'est un petit livre délicat cousu d'un fil rouge. Il est composé de volutes, de traits décousus, de petites marches qu'une fillette tente de gravir. Aux filles du conte. Celles dont on a lu toutes les histoires, de petites silhouettes craintives, rêveuses, amoureuses. Celles que l'on muselle pour mieux les asujettir. Pourtant, la fille du conte " n'a pas demandé les serrures".
    C'est un petit livre que j'ai relu plusieurs fois parce qu'il stylise les émotions. La lecture peut introduire à un surcroît de vigilance et de réflexion.
    On s'arrache à l'illusion référentielle des contes. Un petit pas de côté dans l'épaisseur du langage. Les filles du conte nous offrent à lire dans la gueule du loup.
    Ce petit livre est un support de possibilités créatrices. Les illustrations de Frédérique Bertrand instaurent une lecture mais aussi un enrichissement et la révélation d'un envers des contes. Elles s'emparent des jolis mots de Thomas Scotto, du déroulement de l'écriture pour en faire un écheveau que leur graphisme dénouera. L'image est creatrice d'existence, là où le texte souligne la volonté de négation où l'on a trop souvent enfermé les filles du conte.
    Ce petit livre offre une émouvante retrouvaille avec la fillette et son potentiel d'action.
    Avec certains livres, on développe un rapport affectif sans doute plus immédiat. Ce petit livre écrit par Thomas Scotto, publié aux éditions du Pourquoi pas entraîne un surplus de sens et d'affect, de rêverie qui danse sur chaque mot, chaque image. C'est un beau livre qui est de l'ordre du vivant, du mouvement, du désir, de l'expérience ressentie et commune.
    Je souhaite vivement que le lecteur dans l'entre-deux du texte et des illustrations cherche à placer sa propre voix, son imagination et ses affects.
    Merci aux auteurs de rendre visible et lisible avec délicatesse la mobilité temporelle de naître fille.